Sachant que « penser » est le sens figuré de « peser », on appréciera ce fort volume de 520 pages. Et à charge du lecteur de dénouer le fil de l’intrigue à partir du titre Homéomorphe (de même forme) utilisé en mathématiques pour désigner deux espaces topologiques qui sont « le même » vu différemment. L’histoire s’inscrit dans le quartier d’une ville d’URSS après la seconde guerre mondiale. En vertu du socialisme scientifique, il a pour but d’expérimenter « sur les populations réelles (les) théories des groupes », soumettant ainsi « les habitants au contact permanent d’une barrière invisible qui les séparerait du reste du monde ». Après la chute du communisme, ce quartier (en double identique) devient une zone de non-droit où s’affrontent différents gangs de la drogue. L’intrigue tourne autour d’un mystérieux accident de voiture, en décembre 1995, où périssent Yvan P., étudiant, Natalia P., sa mère et le conducteur non identifié. Ainsi restent de la famille Mikhaïl P., le père, mathématicien à l’institut Landau, en phase terminale d’un cancer,  et Dmitri, le second fils prodige, qui, bien qu’alcoolique, drogué et marginalisé, parviendra à résoudre l’équation que son paternel avait laissé en plan. « Le flot du temps se comporte sur toute cette histoire comme une sorte d’opérateur régularisant et ce processus est irréversible. » Yvan y joue le rôle d’un médium qui développe une trame policière pour mettre à jour des rapports familiaux, amoureux et sociaux empruntant, tour à tour, des styles réaliste, lyrique, académique et poétique … Ce jeu de miroirs force la réflexion d’un lecteur ébloui mais pas aveuglé.