« Mais un gosse et une bonne femme dans le blizzard, autant que je m’en souvienne, c’était pas encore arrivé (…) Parce que ça n’a pas de sens, et qu’ici tout a un sens, parce que chaque geste vous coûte un effort et que Dame Nature, elle vous fait jamais de cadeaux. » Ici, c’est un hameau en Alaska. Une jeune femme, Bess, a lâché la main du gamin pour refaire ses lacets. Il s’est évanoui dans la tourmente. Autour d’elle, trois personnages vont partir à sa recherche, volontaires ou contraints : Cole et Freeman, des voisins ; Benedict, son père ? Tous se demandent pourquoi elle est partie : « Même une fille aussi spéciale qu’elle aurait dû savoir qu’on ne sort pas dehors en plein blizzard. » Le récit se compose d’une succession de courts monologues des quatre protagonistes pendant leur recherche. Ils évoquent aussi d’autres personnes comme Clifford, alcoolique notoire, qui se joint à eux, ou des gens de la famille vivants ou morts : grand-père, grand-mère, oncle… Peu à peu, le lecteur découvre ce qui unit et oppose ces personnages qui, eux, ne le savent pas forcément. Pourquoi, par exemple, le seul Noir, Freeman, vétéran du Vietnam, s’est-il enterré dans ce trou perdu au milieu de cette nuit blanche ? Tous sont rongés soit par l’envie, soit par la jalousie, soit par la culpabilité, soit par leur origine, soit par plusieurs de ces composants explosifs. Dévoiler ne serait-ce qu’un petit secret de l’un d’eux casserait le suspens haletant de ce qu’il faut bien appeler un thriller, mais un thriller épuré et d’autant plus détonnant jusqu’à la révélation finale des causes de cette disparition. Un thriller plus proche d’une nouvelle de Flannery O’Connor que de Patricia Highsmith.

Blizzard, vous avez dit blizzard… Si la femme a lâché la main du petit Thomas, le lecteur, lui, ne pourra lâcher le roman et le dévorera des yeux jusqu’au point final.