Parmi les nombreuses scènes gravées dans la mémoire des lecteurs des Trois Mousquetaires, la plus emblématique et singulière reste cette condamnation unanime et masculine de la diabolique Milady de Winter « d’une beauté à pleurer » livrée au bourreau par ce quatuor de fidèles et loyaux serviteurs de la Couronne. Or, par ce roman, fidèle à l’intrigue légendaire, voici mis « à mal » le portrait à charge de cette femme, de la femme soi-disant dépourvue de tout scrupule, démoniaque et ensorceleuse. L’auteure, derrière le masque de la tragédienne, restitue la voix humaine d’une femme « coupable d’être désirante. Coupable d’être désirée. Coupable d’être innocente. Coupable d’être rusée. » Cet ajustement s’opère, peu à peu, par la succession des différents points de vue des protagonistes pour approcher d’une vérité dont la vraisemblance ne laisse pas moins trouble cette icône féminine (enfant martyre, amante, épouse, mère) comme ses prétendues victimes masculines, forgées dans une cruauté machiste. Dans la plus pure tradition du roman de cape et d’épée, lectrice et lecteur en viennent à croiser le fer de manière jubilatoire pour se rallier au cri « humain, trop humain » du titre : « Je voulais vivre. »