Pierre Louÿs , dans un article paru dans la revue Comœdia en 1919, avance que Molière est un chef-d’œuvre de Corneille en s’appuyant sur une ressemblance stylistique. Et cette bombe à retardement fut à nouveau reprise récemment par des analyses lexicales qui restent, on s’en doute, très controversées. Eve de Castro, loin de cette querelle d’experts,  romance cette affaire en « pacte secret de deux génies » qui se déchirent autant qu’ils se complètent dans une rivalité professionnelle et amoureuse. L’intrigue se noue pendant et après l’enterrement de Molière dans l’alternance de points de vue de quatre personnages : Pierre aussi sombre dans ses habits noirs que dans ses tragédies rances, l’Accoucheuse comme se nomme elle-même Madeleine Béjart, compagne et mentor du comédien Molière, l’Intouchable, dit Baptiste (Poquelin) qui « farcise » les vers du « Vieux » pour cabrioler sur scène à l’envi, la Désirée en la personne d’Armande qui devient l’épouse de Molière par ambition, que courtise vainement le libidineux Corneille et qui nous réserve quelques surprises peu morales. Enfin, Le Petit qui désigne le comédien Michel Baron se pose en témoin et artisan de cette légende. Autour de ce « cadavre exquis » se tisse une intrigue folle qui se déroule sur une dizaine d’années passées en tournées provinciales puis, en autant de temps, à Paris et à Versailles près du Roi Soleil. Séduit par cette ingénieuse vraisemblance romanesque, le lecteur finit par y trouver une saveur de vérité.