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Notre lecture

Pas de littérature !

Gringoire Centon, écrivain raté, est obligé de se rabattre comme traducteur de polar dans la toute nouvelle collection de la Série Noire, dirigée par Marcel Duhamel dans les années 50. D’ailleurs, Gringoire évite le plus souvent de le rencontrer dans la prestigieuse maison où il vient chercher une « rallonge », car il tire la langue et traîne à terminer sa traduction de Fiction Murders que son boss « avait décidé d’intituler J’en parlerai à mon cheval, allez savoir pourquoi ». L’ennui majeur pour assurer ce job, c’est que « si mon tailor était riche, dit-il, mon anglais était pauvre ». L’autre point noir de son ambition, c’est qu’il est habité par un antiaméricanisme viscéral dont le fondement se retourne en atout : sa femme Gisèle, dactylo, divorcée d’un Américain, connaît bien la langue de Hammett et compagnie… En épouse effacée de cette époque, elle « ne poussait jamais son avantage qu’au profit (de son mari)». C’est pourquoi elle le pousse à fréquenter le monde des caves où il croise la fine fleur, pas très fraîche, de Saint-Germain-des-Prés. En plus, il est aussi animé d’un scrupule qui réveille sa vocation d’écrivain (dont Gisèle n’a jamais douté), il se devait d’arranger en authentique argot les traductions littérales de sa secrétaire. Et pour cela, il faut fréquenter le milieu et, à trop le fréquenter, il fait de mauvaises rencontres, anciens collabos, flics pourris, agents de la CIA, pauvres frappes… Ainsi cette Fiction Murders, à force de rechercher une authenticité linguistique et sociologique, le fait entrer de plain-pied (que l’on prend !) dans la réalité qui devient la matière explosive, jouissive et hilarante de ce polar. Une belle détente à partager sans modération !