Ce récit envoutant nous ouvre les portes d’un cabinet de curiosités, fait de souvenirs épars, ténus et fugitifs, saisis dans une rêverie poétique. « Le lieu, c’est une maison (un ancien pressoir à cidre) au bout d’un long chemin bordé de haies, houx et aubépines avec quelques frênes-têtards, comme il y en a tant dans le pays d’Auge, Normandie ». Le comportement des parents et l’atmosphère de cette campagne ont quelque chose de dhôtellien : Après avoir écouté sur France inter une émission de Claude Villers, son père (magasinier dans un garage) et sa mère (femme de ménage), sur un coup de tête, décident de quitter Lisieux pour élever des chèvres et vendre des fromages. Mais « tout s’arrêtera vers 1990, quinze ans de tentatives et un échec au final. Quinze ans seulement et toute une vie pourtant ». S’étant heurtée toute son enfance aux lourds silences des adultes, Stéphanie recompose « la marqueterie du boccage », fait de trajets réduits à des allers et retours de la maison au collège puis au lycée, mais aussi de « chemins (…qui) devenaient des espaces de liberté, le moyen d’arpenter le pays au plus secret des recoins oubliés… » Elle cherche dans « les objets » retrouvés « des preuves de vies antérieures, n’importe quel élément qui m’aurait permis de comprendre qui nous étions et d’où nous venions ». Le lecteur chinera dans cette brocante des descriptions impressionnistes, des sentiments et sensations sur les choses et les personnes comme une invitation à remuer ses propres souvenirs.