- Franck Pavloff
- date de publication : septembre 2024
- éditeur : Albin Michel
- Littérature
L’hôtel dont le nom sert de titre au roman figure un navire fiché sur un piton rocheux qui domine la mer et Cerbère, dernier bourg avant l’Espagne. Quant au « rayon vert » comment ne pas penser au délicieux roman de Jules Verne et à l’adaptation cinématographique de Rohmer ? Le roman joue magistralement sur la mémoire et la mort qui hantent le présent. Trois personnages partent à la recherche de deux fantômes, l’un de la Retirada (exode des réfugiés de la guerre civile espagnole) : Antonio Machado enterré à Collioure et l’autre, recherché par les nazis, Walter Benjamin qui s’est donné la mort à Portbou, côté espagnol, où il est enterré anonymement. Une photographe, installée dans cet hôtel art-déco, suit les passages des clandestins qu’elle voit en bas dans d’anciennes voitures de luxe, sorties du tunnel de la gare. Un violoniste « qui connaît aussi bien les poésies de Machado que ses partitions » part autant à la recherche de ses origines que de la valise égarée du poète. Une jeune-fille, sortie de prison et en fugue, parcourt le chemin du philosophe allemand qui y aurait caché ses derniers manuscrits. Constatant avec l’auteur que « la Catalogne est le pays des mémoires égarées. », à charge aux lecteurs de suivre le fil d’Ariane de ce récit qui mêle mythologie (cf. Cerbère), onirisme ( quête d’un avenir meilleur) et réalisme (errance des clandestins). Impossible d’échapper à l’envoûtement de ces fantômes, sortis des ténèbres du passé pour mettre à jour un présent encore nébuleux… Restituer la magie d’un lieu, n’est-ce pas plutôt l’inventer ?