Voici un roman maritime qui tient autant de l’investigation policière à propos de changements de pavillons que d’un reportage sur la condition des équipages cosmopolites d’un super pétrolier, baptisé le Salem. Ce fait divers authentique a défrayé la chronique en 1980 : au large des côtes sénégalaises, la salle des machines prend feu avec 200 000 tonnes de brut jusqu’à ce que le super tanker sombre, mais la marée noire attendue ne se produit point. Les assurances vont déléguer des enquêteurs en même tant que des marins vont délier peu à peu leur langue… L’auteur restitue l’historique du Salem avec ses changements de propriétaires, son itinéraire dans sa dernière course et les aléas de son voyage : « Au hasard de mes cogitations, je m’étais souvenu d’une citation de Bertolt Brecht, tirée d’un essai intitulé Cinq difficultés pour écrire la vérité. Brecht y raille les auteurs qui refusent de s’occuper des problèmes réels de leur société : ils lui font penser à des peintres qui couvriraient de natures mortes les parois d’un navire en perdition. » C’est ainsi qu’en grattant ce vernis, on découvrira la plus extraordinaire escroquerie du siècle ! Cette lecture nous amène dans le même état d’esprit que celui du  narrateur face à cette découverte : « Je me retrouvais comme un enfant face à un tour de magie. »