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Notre lecture

Rébus

Rébus est une réédition d’un ouvrage paru chez Minuit en 1957. Il offre un double intérêt : le premier est de déterrer un auteur dont le nom est peut-être familier aux cinéphiles puisqu’il était le scénariste de Claude Chabrol et d’Éric Rohmer. De plus, dans Fahrenheit 451, on voit le livre Rébus flambé, roman préféré de Truffaut. A cette curiosité, il faut ajouter cette note biographique : « Il aurait dit à sa jeune épouse la nuit de Noël 1983 : « Tue-moi si tu veux, mais arrête de m’emmerder » avant qu’elle le larde de trois coups de couteau mortels. » Le second intérêt se trouve dans cette remarque prémonitoire que l’on peut lire dans ce roman : « La vraie destruction, comme la mort, doit frapper où elle veut, n’importe comment. Elle ne s’embarrasse pas de principes. » Mais le plus important est que cette phrase énonce parfaitement le thème de cette histoire. Dans la première partie qui occupe les trois-quarts du livre, le marquis Maki-Tomo expose une situation pour le moins insolite : lui et quelques amis sont conviés à mettre totalement en pièces tout ce qui se trouve à l’intérieur de la maison de Rodolphe.  « J’imagine que Rodolphe a voulu prendre la mesure tout à la fois de nos talents et de notre goût de vivre, comme il a fait l’inventaire du mobilier et en a éprouvé la résistance. » Mais cette mise à sac ne se fera pas sans heurts ni se poser quelques questions : « Nous nous aperçûmes vite qu’il n’était pas possible de mettre de l’imagination dans une œuvre destructrice. Nous avions, par exemple, projeté d’anéantir chaque objet selon sa nature, son contenu, sa destination : un piano en jouant trop fort, une table en la surchargeant. » Tout y passe : livres précieux, tableaux de maîtres, objets anciens, lettres d’hommes célèbres… Et autant de façons pour les bousiller.  Le cinéphile pourrait rapprocher cette entreprise de destruction systématique à La Grande Bouffe si l’on en dévoilait la fin… Le récit de Rodolphe qui compose la seconde partie n’est pas moins insolite : le narrateur se retrouve dans un monde plongé dans l’atmosphère de 1984 de Georges Orwell. « A ce propos, parlons d’une de nos plus notoires curiosités, je veux dire la prison. J’ai fait remarquer qu’il n’y avait plus, depuis longtemps, de police chez nous. Les fautifs se rendent chez le juge, celui-ci les condamne et les laisse libres (mais pas un n’y manque), qui de se donner la mort, qui de se couper un orteil ou de s’enfermer dans cette singulière prison… » Cette réédition sera pour le lecteur une vraie nouveauté !