Les complicités foisonnantes de notre Bédéiste de Champagne-Ardenne sont autant d’explorations dans les domaines littéraires, philosophiques ou scientifiques dont l’érudition et la fantaisie touchent un large public. Dans ce nouvel opus, il s’est acoquiné avec un romancier corrézien pour nous emmener dans une intrigue bucolique pleine de mystère et de passion. Comme l’indique l’en-tête du premier chapitre, toute l’action se déroule autour du clocher de l’abbatiale du village, appelé « le doigt de Dieu » par ses habitants, « les Nichonnais, au nom plus ou moins lourd à porter selon que vous étiez ou homme ou femme ». Cette remarque de présentation donne le ton humoristique de cette histoire qui se passe en 1960. Comment ne pas être sensible (nostalgique pour les anciens, curieux pour les plus jeunes) devant ce décor villageois typique de cette époque : des vignettes saisissent commerçants en blouses ou tabliers et clients en marcels ou gilets sans manches devant un éventail d’échoppes, aujourd’hui disparues. Les voitures ajoutent à ce charme d’antan comme cette 2CV camionnette jaune de la Poste que l’on voit en ouverture. D’autres personnages participent à ce folklore coloré : gendarmes, curé, paysans… Dans cette atmosphère de Spirou-Fantasio se détachent Anna, charmante jeune fille aux prises avec ses deux « harpies » de sœurs et leur père, agriculteur veuf, bourru et alcoolique comme le curé ! Les premiers émois amoureux de la belle vont susciter l’ardeur du bellâtre Polo et la douce inclination du mitron Aristide dont le père, tirailleur Sénégalais, laissa une jambe dans la drôle de guerre. De plus, va se mêler à cette intrigue galante la convoitise d’un magot que cache le père d’Anna dans sa cave… Comment ne pas être charmé par autant d’ingrédients voluptueux et mystérieux, servis par une ligne claire ?