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Notre lecture

La nuit des pères

« Ce serait bien que tu viennes, depuis le temps. Il faut qu’on parle de papa. » Cette invitation d’Olivier à sa sœur Isabelle provoque un retour dans le temps auprès d’un père de 80 ans atteint d’un « délitement de la mémoire ». Se déroule alors un drame en quatre jours, quatre actes où s’épanchent leurs trois voix pour conjurer le silence. C’est celle d’Isabelle, documentariste, qui prédomine  et s’adresse tour à tour à son père, guide de haute montagne, à son frère, kiné revenu dans le village paternel, et à son compagnon, cameraman, dont elle s’accuse de la mort récente.  « Tu ne seras jamais aimée de personne (…). Tu vas rater ta vie » : ces deux réflexions du père à sa fille, parmi tant d’autres parfois pires et assorties de violences, forment le cadre duquel elle sortira le plus tôt possible avec « cette envie de liberté, brutale et non négociable » qu’elle partage avec son géniteur ; elle comprend enfin qu’il était « heureux là-haut, et seulement là-haut, heureux de partir, toujours, de laisser (sa) colère entre (les) murs, comme un déchet radioactif ».  La passivité de sa mère qui prend les coups comme la pusillanimité de son frère n’ont guère eu grâce à ses yeux. Les attitudes et les échanges entre les personnages façonnent, peu à peu, un présent qui les apaise. Dès l’arrivée de la narratrice, le père se montre plus amène et il finira par sortir de son mutisme : ce sont des circonstances tragiques de l’histoire de France qui ont gâché sa vie et, par contrecoup, celle de toute sa famille. Olivier apportera la note finale de la réconciliation face au destin que le père s’est choisi…

L’auteure tisse cette histoire familiale dans un va-et-vient entre le passé et le présent avec une grande subtilité et sensibilité. La variation des points de vue des protagonistes montre aussi la complexité de la réalité et l’improbabilité d’une vérité.